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Empire allemand (1871-1918) | |||||||
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Reich allemand
Deutsches Reich (de)
1871 – 1918
Drapeau |
Armoiries |
Devise : Gott mit Uns
(« Dieu est avec nous »)
Hymne : Das Lied der Deutschen
Heil dir im Siegerkranz
Die Wacht am Rhein
Carte du Reich allemand sous l’Empire.
Statut | Monarchie constitutionnelle fédérale |
---|---|
Capitale | Berlin |
Langue | Allemand, comme seule langue officielle, avec minorités linguistiques non officielles : polonais, lituanien, kachoube, slovince, français, sorabe et frison. |
Monnaie | Goldmark |
Population | 41 058 792 hab. (est. 1871) 45 234 061 hab. (est. 1880) 49 428 470 hab. (est. 1890) 56 367 000 hab. (est. 1900) 64 925 993 hab. (est. 1910) |
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Superficie | 540 766 km² (1910) |
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18 janvier 1871 | Unité |
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9 novembre 1918 | Révolution allemande, proclamation de la République |
28 novembre 1918 | Abdication formelle |
Entités précédentes :
L’Empire allemand (en allemand : Deutsches Kaiserreich, également dénommé Reich allemand ou Deuxième Reich) est le régime politique de l'Allemagne de 1871 à 1918. État-nation historique de l'Allemagne[1], l'Empire allemand est une monarchie parlementaire autoritaire avec une organisation territoriale fédérale.
Ce régime suit la dissolution de la Confédération germanique (1815-1866). Après la constitution de la Confédération de l'Allemagne du Nord (1867-1871), l'Empire allemand est l'aboutissement de la formation d'un régime impérial dominé par la Prusse, la maison des Hohenzollern et indépendante de l'Autriche. C'est la solution petite-allemande (Kleindeutsche Lösung) qui parachève l'unité allemande. Le roi de Prusse Guillaume Ier est proclamé kaiser à Versailles le 18 janvier 1871 après la victoire de l'Allemagne contre la France de Napoléon III à l'issue de la Guerre franco-allemande de 1870.
Sur les plans économiques et sociaux, l'Allemagne impériale est marquée par le développement d'une industrie de pointe, elle passe d'un état rural à un état industrialisé. Le secteur tertiaire se développe, le commerce et la finance prennent une place plus importante. Les réparations de guerre de la France encouragent ce développement, qui sera toutefois temporairement ralenti par le krach de 1873. La place de l'artisanat et de l'agriculture baisse dans le calcul du PIB. Les changements sociaux principaux de cette période sont l'exode rural, l'urbanisation et la croissance démographique. Cependant la noblesse garde son prestige et sa mainmise dans la diplomatie, l'armée, la politique et la haute administration[2].
Le développement des politiques intérieure et extérieure se fait sous l'impulsion du chancelier impérial Otto von Bismarck jusqu'en 1890. Cette période est considérée comme une phase relativement libérale du régime : des réformes intérieures sont menées, le Kulturkampf (le combat pour un idéal de société) permet une indépendance de l'Allemagne vis-à-vis des autorités religieuses catholiques, malgré un tournant conservateur en 1878-1879 avec, notamment, l'adoption de lois antisocialistes. L’État reste interventionniste et met en place des mesures de protectionnisme économique et un système de sécurité sociale.
Dans le domaine de la politique internationale, Bismarck met en place un système complexe d'alliances avec des États voisins afin de maintenir l'Empire allemand en position de force face à la France. L'Allemagne renforce sa domination maritime et devient une puissance rivale des autres puissances coloniales dans le partage du monde, notamment avec le Royaume-Uni.
En 1890, Bismarck est contraint à la démission. Le nouveau kaiser Guillaume II mène un règne plus personnel, même s'il reste sous l'influence d'autres personnalités. Ses décisions prennent parfois une tournure incohérente ou imprévisible. Cette période est appelée fréquemment ère wilhelminienne.
La montée d'organisations et de partis de masse ainsi que l'importance croissante de la presse renforce le poids de ces derniers dans l'opinion publique. En réaction, le gouvernement mène une politique d'expansion coloniale et d'armement de la flotte très populaires pour compenser des politiques générales anti-sociales-démocrates. L'Empire allemand renforce sa domination, mais reste dans l'isolement, ce qui n'éloigne donc pas le risque d'une guerre. Le jeu d'alliances dessert la stabilité de l'Europe en 1914. Première puissance militaire européenne, l'Empire allemand, contraint de gérer simultanément plusieurs fronts, est vaincu en 1918 et perd le soutien de la population.
L'Empire allemand prend fin le 9 novembre 1918, deux jours avant l'armistice qui met fin à la Première Guerre mondiale, par l'abdication de l’empereur Guillaume II et la proclamation de la république de Weimar.
En allemand, Deutsches Reich, traduit en Empire allemand ou en Empire germanique[3] peut renvoyer :
Aujourd'hui, le terme Reich renvoie, quand il n'est pas traduit en français, au Troisième Reich. Sans précisions supplémentaires, Empire allemand désigne le régime politique de l'Allemagne de 1871 à 1918.
L'historiographie utilise également le terme de Deuxième Reich[4]. Pour désigner l'Allemagne de cette époque sous ses aspects culturels et sociaux, le terme d'Allemagne wilhelminienne est aussi utilisé (en référence aux empereurs Guillaume Ier (Wilhelm I.) et Guillaume II (Wilhelm II.), deux des trois kaisers de cette période).
L'Empire allemand résulte d'une extension de la Confédération de l'Allemagne du Nord et de son changement de dénomination.
Par les traités dits de novembre, les royaumes de Bavière et de Wurtemberg ainsi que les grands-duchés de Bade et, pour la partie située au sud du Main, de Hesse, adhérent à la Confédération.
Ces traités sont :
Le 18 janvier 1871, dans une France vaincue, l’Empire allemand est proclamé dans la galerie des Glaces du château de Versailles et Guillaume Ier, roi de Prusse, devient empereur allemand. La date choisie est symbolique puisqu'elle correspond au 170e anniversaire du couronnement de Frédéric Ier comme roi en Prusse, le 18 janvier 1701. On appelle « période de fondation » (Gründerzeit) la période correspondant au règne de Guillaume Ier, jusqu’en 1888, et au mandat d’Otto von Bismarck comme chancelier impérial.
Dès sa création, l’Empire est marqué par des crises graves. Bismarck voit un peu partout des ennemis du nouveau régime : les catholiques regroupés dans le parti du Zentrum et contre lequel il mène le Kulturkampf ; les Polonais de la province de Posnanie ; les Français d’Alsace-Lorraine ; la Légion guelfe (en) du Hanovre ; les socialistes qui se forment en Parti social-démocrate (SPD). Après deux attentats contre l’empereur en 1878 commis par des individus agissant seul, Bismarck fait voter par les conservateurs et les libéraux du Reichstag, le 18 octobre 1878, une loi qui interdit les associations socialistes, social-démocrates ou communistes visant le « renversement de l’autorité de l’État ou de l’ordre social établis », ainsi que leurs journaux, leurs rassemblements et leurs membres qui sont menacés d’exil.
En même temps, Bismarck mène une politique sociale visant à apaiser certaines revendications sociales et à diminuer l’audience de la social-démocratie : le 15 juin 1883, la loi sur l’assurance maladie est adoptée.
Le 9 mars 1888, Guillaume Ier meurt à l’âge de quatre-vingt-onze ans. Son fils Frédéric III, déjà atteint d’une maladie incurable, lui succède sur le trône et meurt après cent jours de règne le 15 juin. Son successeur, Guillaume II, âgé de vingt-neuf ans et petits-fils de Guillaume Ier, accède alors au trône. On appellera cette année l’année des Trois Empereurs. Le règne de Guillaume II est marqué par la primauté de l’empereur dans la politique (wilhelminisme), notamment en politique extérieure où la prudence bismarckienne cède le pas à la Weltpolitik.
Le 18 mars 1890, Bismarck soumet une demande de mise en congé à l’empereur en raison du conflit qui les oppose en politique extérieure. Deux jours plus tard, le 20 mars 1890, il est démis de ses fonctions de chancelier impérial et de ministre-président de la Prusse, et le général Leo von Caprivi lui succède.
Le chancelier von Caprivi ne prolonge pas la loi antisocialiste.
Deux jours avant la fin des hostilités de la Première Guerre mondiale, la révolution de Novembre provoque la chute du régime impérial. Le 9 novembre 1918, le chancelier Maximilian von Baden, après avoir décrété l’abdication de l’empereur Guillaume II et la renonciation au trône du prince héritier Wilhelm (techniquement, Guillaume III), démissionne et transmet ses pouvoirs à Friedrich Ebert, chef des sociaux-démocrates majoritaires. Le même jour, la république est proclamée par Philipp Scheidemann et la république socialiste par Karl Liebknecht.
Le drapeau de l'Empire allemand est également celui de la Confédération d'Allemagne du Nord. Il unit les couleurs de la Prusse (le noir et le blanc, originellement les couleurs de l'Ordre Teutonique) et de la Ligue hanséatique (le rouge et le blanc, originellement les couleurs du Saint-Empire romain germanique et du drapeau du Christ).
Le tricolore horizontal noir, blanc et rouge correspondait à la « politique de fer et de sang » du chancelier Otto von Bismarck.
Lors de la proclamation de l'Empire allemand, on vit le développement de nombreux drapeaux basés sur le tricolore noir, blanc et rouge, notamment des pavillons maritimes, des drapeaux coloniaux, des drapeaux officiels, des bannières royales et impériales.
Après avoir cherché à résoudre les profondes divergences d'opinion du public sur la question du drapeau, on en vint à un compromis, qui essayait d'exprimer des différences politiques inconciliables à l'aide de symboles communs. Le drapeau civil adopté fut le tricolore noir, blanc et rouge ; le drapeau d'État était le même, avec les armes de l'Empire au centre. Ces armes étaient constituées de l'aigle noir traditionnel avec des attributs rouges dans un écusson d'or.
Les bannières personnelles de la famille impériale avec le champ jaune d'or, les croix noires et l'écu médiéval au centre étaient utilisées lors des grandes occasions ou des déplacements impériaux (comme la visite de Guillaume II à Damas).
Inspiré du modèle de drapeau prussien, l'Empire allemand met la croix de Fer sur certains de ses drapeaux, dont le drapeau de l'Empereur, celui de l'État et celui de l'Armée. Sur le drapeau de l'Empereur, on peut voir la croix avec, en son centre, le blason de l'Empire et, sur ses extrémités, la devise allemande : « Gott mit uns » signifiant, « Dieu est avec nous ». Le drapeau de l'armée, ayant une croix traversante noire, tirant un peu vers la droite, et ayant en son centre un cercle dans lequel se trouve l'aigle impérial, a la croix de Fer dans un canton au couleur nationales.
Les États composant l'Empire allemand étaient :
En 1900, le Reich couvrait une superficie de 540 667 km². Il occupait le Nord et l’Ouest de l’Europe centrale, entre la mer (mer du Nord et mer Baltique) et les Alpes, entre les Vosges et le Niémen à l’Est. Il était entouré au Nord par le Danemark, à l’Est par la Russie, à l’Ouest par les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la France, et au Sud par la Suisse et l’Autriche-Hongrie.
Par sa superficie, l'Empire allemand était le troisième des États européens après la Russie et l’Autriche-Hongrie (la France, amputée de l'Alsace-Lorraine, n'a plus quant à elle qu'une superficie de 530 000 km²). Mais, contrairement à la Russie, l'Allemagne avait un bon climat et une bonne gestion de son territoire et, contrairement à l'Autriche-Hongrie, l'Allemagne se trouvait sur le plateau central européen et disposait de nombreux accès maritimes.
Sa capitale était Berlin, déjà capitale du royaume de Prusse.
Sa position au centre est un avantage autant qu'un inconvénient. Le Reich est au carrefour des flux commerciaux Ouest-Est. Il contrôle donc les marchandises qui vont de Paris à Saint-Pétersbourg ou de Moscou à Amsterdam. Mais lors de la Première Guerre mondiale, l'Allemagne se trouvait dans l'étau France-Russie.
L'Empire est constitué de 25 États fédérés, qui sont des monarchies à l'exception des trois villes hanséatiques (Brême, Hambourg et Lübeck). L'Alsace-Lorraine est dotée d'un statut particulier, la "région d'Empire" (Reichsland Elsaß-Lothringen), avant de devenir le 26e État fédéré, doté d'une constitution propre, à partir du 31 mai 1911.
État fédéré | Régime | Capitale | Superficie en km² (1910) | Population (1871)[6] | Population (1900)[7] | Population (1910) |
---|---|---|---|---|---|---|
Royaume de Prusse | Monarchie | Berlin | 348 780 | 24 691 085 | 34 472 509 | 40 165 219 |
Royaume de Bavière | Monarchie | Munich | 75 870 | 4 863 450 | 6 524 372 | 6 887 291 |
Royaume de Wurtemberg | Monarchie | Stuttgart | 19 507 | 1 818 539 | 2 169 480 | 2 437 574 |
Royaume de Saxe | Monarchie | Dresde | 14 993 | 2 556 244 | 4 202 216 | 4 806 661 |
Grand-duché de Bade | Monarchie | Karlsruhe | 15 070 | 1 461 562 | 1 867 944 | 2 142 833 |
Grand-duché de Mecklenburg-Schwerin | Monarchie | Schwerin | 13 127 | 557 707 | 607 770 | 639 958 |
Grand-duché de Hesse | Monarchie | Darmstadt | 7 688 | 852 894 | 1 119 893 | 1 282 051 |
Grand-duché d'Oldenbourg | Monarchie | Oldenbourg | 6 429 | 314 591 | 399 180 | 483 042 |
Grand-duché de Saxe-Weimar-Eisenach | Monarchie | Weimar | 3 610 | 286 183 | 362 873 | 417 149 |
Grand-duché de Mecklembourg-Strelitz | Monarchie | Neustrelitz | 2 929 | 96 982 | 102 602 | 106 442 |
Duché de Brunswick | Monarchie | Brunswick | 3 672 | 312 170 | 464 333 | 494 339 |
Duché de Saxe-Meiningen | Monarchie | Meiningen | 2 468 | 187 957 | 250 731 | 278 762 |
Duché d'Anhalt | Monarchie | Dessau | 2 299 | 203 437 | 316 085 | 331 128 |
Duché de Saxe-Cobourg et Gotha | Monarchie | Coburg/Gotha | 1 977 | 174 339 | 229 550 | 257 177 |
Duché de Saxe-Altenbourg | Monarchie | Altenbourg | 1 324 | 142 122 | 194 914 | 216 128 |
Principauté de Lippe | Monarchie | Detmold | 1 215 | 111 135 | 138 952 | 150 937 |
Principauté de Waldeck | Monarchie | Arolsen | 1 121 | 56 224 | 57 918 | 61 707 |
Principauté de Schwarzbourg-Rudolstadt | Monarchie | Rudolstadt | 941 | 75 523 | 93 059 | 100 702 |
Principauté de Schwarzbourg-Sondershausen | Monarchie | Sondershausen | 862 | 67 191 | 80 898 | 89 917 |
Principauté Reuss branche cadette | Monarchie | Gera | 827 | 89 032 | 139 210 | 152 752 |
Principauté de Schaumbourg-Lippe | Monarchie | Bückeburg | 340 | 32 059 | 43 132 | 46 652 |
Principauté Reuss branche aînée | Monarchie | Greiz | 316 | 45 094 | 68 396 | 72 769 |
Ville libre et hanséantique de Hambourg | Republique | Hambourg | 414 | 338 974 | 768 349 | 1 014 664 |
Ville libre et hanséatique de Lübeck | Republique | Lübeck | 298 | 52 158 | 96 775 | 116 599 |
Ville libre et hanséatique de Brême | Republique | Brême | 256 | 122 402 | 224 882 | 299 526 |
Reichsland Elsaß-Lothringen | Monarchie | Strasbourg | 14 522 | 1 549 738 | 1 719 470 | 1 874 014 |
Empire allemand | Monarchie | Berlin | 540 858 | 41 058 792 | 56 367 178 | 64 925 993 |
L'Empire allemand avait une population de 56,3 millions d’habitants en 1900 et de 64 903 000 habitants en 1910. Pourtant, le taux de natalité baisse : il passe de 35,6 pour mille en 1900 à 27,5 pour mille en 1913, tout comme la mortalité qui passe de 23 pour mille à 15 pour mille. La densité moyenne était de 120 habitants par km² contre 75,9 en 1871. La population est une population jeune : en 1910, 34 % des Allemands ont moins de 15 ans, alors que le quart seulement des Français appartient à cette tranche d'âge.
Les transformations économiques ont provoqué une véritable redistribution de la population. Ce sont surtout les régions rurales de l'Est et de l'Allemagne moyenne qui ont déversé leur trop-plein vers Berlin, la Rhénanie-Westphalie et les ports de la mer du Nord et de la mer Baltique.
Les migrations intérieures gonflent la population urbaine : 60 % des Allemands vivent, en 1910, dans des localités de plus de 2000 habitants. Les 48 villes de plus de 100 000 habitants (dont Berlin, Hambourg, Brême, Munich, Dresde, Stettin, Rostock et Cologne) rassemblent le cinquième de la population totale.
L'expansion économique explique le ralentissement, de plus en plus marqué, de l'émigration. Le Reich devient même un pays d'immigration : les étrangers installés en Allemagne passent de 780 000 (1900) à 1 260 000 (1910). En 1910, les Polonais constituent presque la moitié des étrangers ; 800 000 travailleurs saisonniers, des Slaves surtout, viennent fournir la main-d'œuvre nécessaire aux junkers.
Berlin, qui était la capitale de la Prusse, devint capitale de la Confédération d'Allemagne du Nord puis capitale de l'Empire allemand en 1871 La ville s'était déjà embellie aux XVIIe et XVIIIe siècles, notamment avec Charlottenburg, avec le Palais de Potsdam, avec de nombreux parcs et autres embellissements. Entre 1830 et 1850, Berlin se couvre de nouveaux palais de style classique et de nombreuses académies.
En 1858, Guillaume (Ier) assure la régence de son frère malade. Il devient roi en 1861. Berlin s'agrandit alors de plusieurs faubourgs et compte 524 000 habitants. Le bourgmestre libéral, Seydel, fait tout pour favoriser une industrie berlinoise où les grands entrepreneurs tiennent le haut du pavé : Borsig, Siemens, qui, après le télégraphe, développe le principe de la dynamo, Emil Rathenau, président de la Société berlinoise d'électricité (future AEG). Le conseiller à la Construction James Hobrecht remplace le vieux mur d'enceinte par un boulevard circulaire, que les installations ferroviaires à l'ouest empêchent toutefois de boucler totalement. En 1866, le nouveau chancelier Otto von Bismarck inaugure la Nouvelle Synagogue d'Oranienburger Strasse, marquant ainsi son intérêt pour l'émancipation des Juifs, qui se traduit en 1869 par la promulgation d'une « loi sur l'égalité des confessions », étendue à l'ensemble du Reich.
Lors du versement des 5 milliards de francs-or de réparation par la France en 1871, l'économie berlinoise fait un formidable bond en avant. Le « temps des fondateurs » de l'Empire (Gründerzeit) s'ouvre sur une orgie de constructions de styles plus qu'éclectiques. Le néo-gothique et la brique triomphent : les flèches de cathédrale, les pignons crénelés qui hérissent les usines et les sièges sociaux des grandes entreprises font de leur dirigeants de véritables « junkers citadins ». Le pont d'Oberbaum, le musée de la Marche, les tribunaux et les nouvelles mairies d'arrondissement, construites vers 1900, seront de la même facture. Parfois un chef-d'œuvre émerge, comme le labyrinthe de pierre du hall d'entrée de l'hôtel de ville de Köpenick (1903) ou les délicates crènelures du tribunal administratif de Wedding (de) (1904) mélange de gothique flamboyant et de Jugendstil (style jeunesse).
L'Empire allemand a été organisé par la constitution du 16 avril 1871, modifiée le 19 mars 1888. Elle repose, pour une large partie, sur la constitution de la Confédération de l'Allemagne du Nord qui était une œuvre de Otto von Bismarck.
L'empereur allemand est le chef de l'armée et de la marine ; il promulgue les lois et dirige la diplomatie. Il nomme un chancelier impérial (Reichskanzler), qui n'est responsable qu'envers lui, c'est-à-dire qu'il ne dépend pas du parlement élu. C'est, en réalité, le chancelier qui est le maître absolu de l'administration impériale et du gouvernement, puisqu'il préside le Bundesrat ; ministre unique, il décide de l'orientation de la politique et il propose à l'empereur la nomination ou la révocation des secrétaires d'État, des hauts fonctionnaires qui dirigent selon ses ordres les administrations gouvernementales. Les chanceliers sont aussi ministres-présidents de la Prusse.
L´Empire est de plus composé du Bundesrat et du Reichstag.
Le Bundesrat, représenté des gouvernements des vingt-cinq États, qui compte soixante et un représentants, dont trois pour l'Alsace-Lorraine, présidée par le chancelier impérial. Elle vote les lois, élabore le budget et contrôle les finances. La Prusse y dispose d'une minorité de blocage et peut imposer son point de vue au reste de l'Empire.
Le Reichstag est élu pour trois ans, puis à partir de 1888 pour cinq ans. Il représente le peuple, est élu au suffrage universel mais n'a aucun moyen d'action sur le chancelier.
Le 7 octobre 1879 est un accord - connu sous le nom de « Duplice » - est scellé par traité, entre l'Empire allemand et l'Autriche-Hongrie.
En 1890, Leo von Caprivi succède à Otto von Bismarck, le « chancelier de fer », écarté du pouvoir par Guillaume II. Dès son accession au pouvoir, il signe avec le Royaume-Uni un traité qui suscite la colère des lobbys colonialistes par lequel, en échange de vagues zones d'influences en Afrique, mais surtout de l'îlot stratégique d'Heligoland en mer du Nord, l'Empire allemand renonce au sultanat de Witu, à la côte des Somalis, et reconnaissait le protectorat britannique sur Zanzibar.
À la fin du XIXe siècle, la Grande-Bretagne, première puissance navale et coloniale de l'époque, tient à confirmer la supériorité de sa Royal Navy. En 1888, la peur d'une guerre avec la France et l'accroissement de la flotte russe font redémarrer la construction navale : le British Naval Defence Act de 1889 entraîne la construction de huit nouveaux cuirassés britanniques. Dans ces dernières années du XIXe siècle et au tout début du XXe siècle, la course à la construction des cuirassés est attisée par l'opposition entre le Royaume-Uni et l'Allemagne. Les lois allemandes de 1890 et 1898 autorisent la construction d'une flotte de 38 cuirassés, ce qui menace l'équilibre naval[8]. Si la Grande-Bretagne répond par davantage de nouveaux navires, elle n'en a pas moins perdu une grande partie de sa suprématie. En 1883, le Royaume-Uni possède 38 cuirassés, deux fois plus que la France et à peu près autant que le reste du monde réuni.
En 1893, von Caprivi est à son tour remplacé au poste de chancelier impérial, changement politique qui marque une nouvelle orientation dans la politique diplomatique et coloniale du versatile Guillaume II. Dès ce moment la course aux colonies s'accélère et l'empire allemand en Afrique se consolide.
Au XIXe siècle, l'Empire ottoman - surnommé « l'homme malade de l'Europe » par l'empereur russe Nicolas Ier en 1853, lors d'une conversation avec l'ambassadeur britannique - diminue territorialement, mais entame un processus de modernisation afin de retrouver sa puissance et sa prospérité d'antan.
En 1913, la défaite ottomane lors de la Seconde Guerre balkanique amène les Jeunes-Turcs (Parti Union et Progrès) au pouvoir. Leur volonté de relever l'empire les entraîne dans l'alliance avec l'Empire allemand.
Dans les dernières semaines du régime, le parlementarisme sera instauré par la réforme d'Octobre.
Trois empereurs se succédèrent de 1871 à 1918. Guillaume Ier (1797-1888), roi de Prusse depuis 1861, n'avait tout d´abord pas voulu être empereur, s´adonna donc surtout à son royaume et ordonna à Bismarck la direction de l'Empire allemand. À sa mort, son fils Frédéric III (1831-1888) monta sur le trône mais ne régna que quelques mois. On le disait favorable au libéralisme mais frappé par la maladie il mourut avant d'entreprendre de vastes changements. Il en alla tout autrement pour Guillaume II (1859-1941). Lorsqu'il accède à la dignité impériale, il est âgé de 29 ans et régnera 30 ans sur la Prusse et le Reich. Jeune et impétueux, il aspire à gouverner par lui-même, et, en 1890, Bismarck finit par démissionner. Les chanceliers qu'il nommera par la suite ne seront que les instruments dociles de sa volonté. Dans ce Reich qui est encore une monarchie semi-féodale, l'empereur va imposer ses conceptions personnelles à des chanceliers et secrétaires d'État pusillanimes, choisis pour leur connaissance de la bureaucratie plus que pour leurs qualités politiques.
Personnalité complexe, esprit doué mais impulsif, vaniteux, despotique, il ne supporte pas ceux qui osent le critiquer et entend tout régenter : le conflit avec Bismarck était donc inévitable. Complexé par un bras gauche atrophié, Guillaume II essaie de compenser ce handicap par une agitation fébrile et brouillonne (il voyage constamment, prononce d'innombrables discours, change d'uniforme plusieurs fois par jour…), et par l'affirmation incessante de la grandeur de l'Allemagne pour laquelle il revendique une « place au soleil ». Personnalité « médiatique » avant l'heure, il est omniprésent, par ses discours, ses interviews retentissantes et par le culte dont il fait l'objet : portraits, souvenirs commémoratifs, et jusqu'à son port de moustaches que ses sujets s'empressent d'imiter.
Plus que tout autre souverain allemand, Guillaume II aura su être en adéquation avec les aspirations de son peuple et s'identifier au désir de reconnaissance et aussi d'expansion de la nouvelle Allemagne impériale (à qui on a pu donner le nom d'Allemagne wilhelmienne, Wilhelm signifiant Guillaume). Il a su cristalliser sur sa personne les peurs et les désirs de ses sujets, et a, aux yeux de l'étranger, souvent personnifié un aspect agressif du nationalisme allemand[9].
4 royaumes, 6 grands-duchés, 5 duchés et 7 principautés, ont, dans ce nouveau Reich, conservé d'importantes prérogatives. Si Berlin va progressivement devenir la capitale politique et économique de l'Allemagne, les capitales des États souverains perpétuent la tradition culturelle des Residenzstädte. Les rois de Saxe essayèrent de maintenir la grande tradition qui avait fait de Dresde un des plus importants centres artistiques d'Allemagne. Le duc de Saxe-Meiningen pouvait se vanter d'accueillir dans sa résidence une des meilleures troupes de théâtre d'Allemagne. Munich était un des centres artistiques et intellectuels de tout premier plan qui cherchait à contrebalancer l'influence de Berlin.
Mais à côté de ces États brillants, dans lesquels se développait une vie politique active, existaient des États beaucoup plus rétrogrades, comme les deux duchés de Mecklembourg (Schwerin et Strelitz), restés à l'écart des grandes transformations politiques et économiques du XIXe siècle.
Si les princes régnants surent demeurer très populaires parmi leurs sujets, c'est qu'ils incarnaient une légitimité parfois teintée du particularisme, comme en Bavière, et qu'ils perpétuaient aussi une tradition culturelle qui s'opposait aux appétits hégémoniques de la Prusse. Par l'intermédiaire du Bundesrat, ils surent mettre en échec les velléités centralisatrices du Reich.
Néanmoins, les grandes mutations que connut l'Allemagne dans les deux dernières décennies du siècle se firent sans eux. L'essor industriel, le développement des grands centres urbains, l'expansion commerciale ont modelé une Allemagne nouvelle, fort différente des traditions archaïques et désuètes que pouvait incarner l'Allemagne des Princes.
Titulaire | Mandat | Parti | Note | ||
---|---|---|---|---|---|
Prince Otto von Bismarck 1815-1898 |
Du 22 mars 1871 au 20 mars 1890 | Sans étiquette |
Bismarck fut
ministre-président et ministre des Affaires étrangères du
royaume de Prusse de 1862 à 1890, ainsi que
chancelier confédéral de 1867 à 1871 et
chancelier impérial de 1871 à 1890.
|
||
Comte Leo von Caprivi 1831-1899 |
Du 20 mars 1890 au 26 octobre 1894 | Sans étiquette | |||
Prince Chlodwig zu Hohenlohe-Schillingsfürst 1819-1901 |
Du 29 octobre 1894 au 19 octobre 1900 | Sans étiquette | |||
Prince Bernhard von Bülow 1849-1929 |
Du 16 octobre 1900 au 13 juillet 1909 | Sans étiquette | |||
Theobald von Bethmann Hollweg 1856-1921 |
Du 14 juillet 1909 au 13 juillet 1917 | Sans étiquette | |||
Georg Michaelis 1857-1936 |
Du 14 juillet 1917 au 31 octobre 1917 | Sans étiquette | |||
Comte Georg von Hertling 1843-1929 |
Du 1er novembre 1917 au 30 septembre 1918 | Sans étiquette | |||
Prince Maximilian von Baden 1867-1936 |
Du 3 octobre 1918 au 3 novembre 1918 | Sans étiquette |